Après
Vers le bourg voisin
http://fablehaikus.over-blog.com/2013/10/voyage-dans-les-brumes-de-l-%C3%AEle-de-l-incertitude.html
L'inspection
http://fablehaikus.over-blog.com/2013/10/dans-la-toile-d-araign%C3%A9e-du-probable-incertain.html
Le protocole
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Les intrus
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La digue
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En descendant le fleuve de sable friable du temps
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Les têtes de pierre
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Le rêveur
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Les pèlerins de la mer des cendres
Craquements dans l'empire des Sombres
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Voici aujourd'hui
Le restaurateur des guerres anciennes
Il s'agit toujours pour moi d' illustrer cet incertain dans lequel nous vivons et aussi la solitude radicale des individus dans un Etat totalitaire mais aussi dans tout Etat même démocratique
*
Le restaurateur des guerres anciennes
*
L'un des plus grands bienfaits de l'empire des Sombres pour ses thuriféraires obligés
Que se devaient d'être les citoyens de l'empire et donc Forbes Techkrhein
Était la paix universelle que les Sombres avaient réussi à imposer à tous les peuples
Cette absence de guerre depuis des siècles était si naturelle
*
Que personne et pas même lui ne pouvait en concevoir les horreurs
D'autant que les chroniques qu'il avait à étudier
En tant qu'employé du bureau de la Restauration des Temps Anciens
Á la section « Guerres et Affrontements »
*
Étaient très lacunaires et imprécises dans leur évocation
Malgré paraît-il le grand nombre de ces guerres et leurs ravages
Á l'époque de la civilisation des machines arborescentes
Ce qui finalement avait conduit à la fin de cette civilisation et plus dramatique
*
Presque provoqué la disparition de l'humanité
Qui avait eu beaucoup de mal à s'en remettre
Parce que s'étaient créés après la « Grande Catastrophe » une multitude de royaumes
En perpétuel conflit les uns contre les autres
*
Avant que les Sombres grâces leur en soit rendu n'établissent leur empire et la paix
Et n'ordonnent la création de l'office de la Restauration des Temps Anciens
Pour démontrer aux citoyens à quel point ces nouveaux temps étaient une bénédiction
Et combien les lois qu'ils édictaient qui pouvaient apparaître comme trop sévères
*
Avaient pour unique but le maintien de la paix et de leur assurer une vie heureuse
C'est pourquoi la section « Guerres et Affrontements »
De l' office de la Restauration des Temps Anciens étaient considérée comme la plus importante
Ses membres choisis avec le plus grand soin et
*
Soumis à toute une série d'obligations
Dont l' une des moindres était de ne strictement rien dévoiler de leurs recherches
Avant d'en avoir reçu expressément l'autorisation
Sous peine de déportation dans les camps de travail de la mer des cendres
*
Or Forbes Techkrhein venait de recevoir le mandat d'étudier
Un ensemble des plus anciennes chroniques de l'empire des Sombres
Celui qui évoquait l'une des plus atroces guerres
Qui aurait opposé à cet âge des ténèbres
*
Les citoyens dits « normaux» qu'elles appellent Yankrs ou Yamqs ou Famks
Aux citoyens « difformes » qu'elles appellent Karbs ou Kambs ou Backs
Sans qu'il soit possible de savoir exactement de quelles populations il était question
Même si Forbes pensait que lui et les autres citoyens de l'empire
*
En étaient vraisemblablement les descendants
Guerre à la suite de laquelle les Karbs ou Kambs ou Baacks auraient obtenu
Le droit de se regrouper en caste des « hors-normes » comme de nos jours
De vivre libres avec les mêmes droits que les Yankrs ou Yamqs ou Famks
*
Dans les mêmes contrées de se mélanger avec eux dans les mêmes villes et quartiers
De se marier avec des hommes ou des femmes yankrs ce qui leur étaient interdits jusque là
D'avoir des enfants ce que l'on croyait impossible alors
Avant que l'on ne s'aperçoive que les couples mixtes
*
Au début rares puis avec le temps devenus nombreux
Pouvaient avoir des enfants
Ce qui dans un premier temps se révéla une source d'angoisse et même de réprobation
Pour les Yankrs ou Yamqs ou Famks rapportent ces chroniques
*
Sentiment qui avait perduré pendant des siècles dans l'empire des Sombres
Puisque le citoyen ou la citoyenne qui avait consenti à un mariage mixte
Continuait à être mal considéré parce qu'il elle contribuait
Á l'augmentation du nombre des « hors normes » au détriment des « normaux »
*
Jusqu'au moment où l'on avait compris que les « hors normes » avaient bien souvent
Des capacités non seulement physiques mais intellectuelles
Sinon morales
Au-dessus de celles des « normaux »
*
Raréfaction des normaux qui avaient donné aux femmes normales une aura
Qui n'avait cessé de se renforcer
Et qui perdurait aujourd'hui dans l'empire
Au fur et à mesure de la réduction relative de leur nombre
*
Ce que Forbes en tant que « Hors normes » qui avait épousé une femme « normale »
Était bien placé pour savoir
D'autant qu'elle lui avait imposé comme la loi le lui permettait un co-époux
Qu'il n'avait pu qu'accepter étant incapable de lui refuser quoique ce fût
*
Malgré son chagrin chaque jour un peu plus incommensurable
Au fur et à mesure qu'il constatait qu'elle préférait l'autre
Avec qui elle passait la plupart de ses nuits
En l'encourageant à ne pas rentrer chez eux et à dormir à son bureau
*
Ce qui faisait de Forbes un employé considéré comme modèle par ses chefs
Mais rejeté par ses collègues qui se sentaient eux aussi dans l'obligation de rester à leur bureau
Certaines nuits pour ne pas être mal notés
Périodiquement Forbes constatait la disparition d' un de ses rapports
*
Ce qui le retardait dans son travail et
Avait fini par le faire considéré certes comme un employé modèle mais un peu lent
Il n'osait s'en plaindre
Comme il n'osait avouer les raisons de son prétendu zèle excessif
*
La contrée où cette guerre aurait eu lieu se serait nommée
Comme Forbes avait pu le découvrir après plusieurs semaines de travail patient
La Karbalnibardie ou Kambalnibardie ou Baackbalnibardie
Les chroniques restaient évasives sur son emplacement et sur l' époque
*
Il avait conjecturé que l'emplacement
Devait vraisemblablement être au-delà de la mer des cendres dans l'hémisphère sud
Aucune date précise ne pouvait de même être avancée
Tout ce qu' il pouvait dire était qu'un jour funeste jadis la guerre avait commencé
*
Surgie disait-il dans un de ses rapports très appréciés
Tel un monstre prêt à dévorer tous les hommes
Parce que soit les Yankrs soit les Karbs
Avaient pris la décision d' ouvrir la porte de sa cage
*
Non seulement les chroniques ne pouvaient dire
Qui des Yankrs ou des Karbs avaient pris cette décision
Mais encore elles ne précisaient pas pourquoi
Quoique certaines les plus nombreuses penchassent pour la responsabilité des karbs
*
Et d'autres les moins nombreuses invoquassent comme raison de cette guerre
« La transparence » selon le terme sibyllin employé par elles
A laquelle les karbs auraient été condamnés par les Yankrs
« Transparence » impliquant leur « non existence » affirmaient-elles pour une fois plus précises
*
A moins que ce ne fût « la négation de leur humanité »
Au prétexte qu'ils étaient « hors normes »
Comme si l'humanité pensait Forbes avait à voir
Avec le fait d'avoir les mains palmées ou une peau kératinisée
*
Caractéristiques très courantes aujourd'hui d'un grand nombre de citoyens de l'empire
Et notamment de Forbes qui était un « hors normes» avec des mains à six doigts
Et une peau kératinisée que Myrdane sa femme au début de leur union
Aimait à parcourir de sa paume et qui aujourd'hui lui inspirait plutôt de la répulsion
*
Toujours est-il que Yankrs et Karbs avaient entrepris
De s'entre-tuer de se massacrer de s’éventrer de s’égorger de se torturer de se démembrer
De tenter de s'éliminer complètement
De la manière la plus féroce qui puisse être imaginée
*
Les Yankrs avaient donc arrêté de tuer de massacrer d'égorger de dépecer les Karbs
Disaient ces très anciennes et lacunaires chroniques de manière méthodique
De les dépecer en forme de rhomboèdres de cubes de cônes de sphères de pyramides de prismes
De cylindres de tétraèdres de parallélépipèdes
*
Empaquetés numérotés classés rangés les cônes avec les cônes les sphères avec les sphères
Les têtes avec les têtes les rhomboèdres avec les rhomboèdres les troncs avec les troncs
Les cylindres avec les cylindres les thorax avec les thorax les bassins avec les bassins
Ainsi de suite tous bien numérotés classés rangés dans des caisses
*
Transportées la nuit vers des contrées inconnues et enterrées en secret
Ou bien incinérés dans des bâtiments prévus à cet effet
Dont il faut dire que l'on n'a jamais découvert le moindre vestige
Ce qui jetait un doute sur cette affirmation
*
Partagée par Forbes comme il l'avait mentionné dans un de ses rapports
Donc les Karbs disparaissaient dans les ténèbres sombres et silencieuses
Emportés tous hommes femmes enfants vieillards
Vers ces destinations inconnues comme s'ils n'avaient jamais existé
*
De leur côté les Karbs tuaient massacraient émasculaient égorgeaient coupaient tranchaient
Les Yankrs en morceaux mais indiquaient une majorité de chroniques
Pas en rhomboèdres pas en tétraèdres pas en cubes pas en cônes ni en sphères ni en parallélépipèdes,
Simplement en bouts en bribes en débris en lambeaux en tessons en quignons en miettes
*
Ni empaquetés ni classés ni transportés vers des lieux inconnus
Mais laissés là ici au bord des chemins des routes des bas-côtés
Dans le jour qui se levait avec sa lumière encore mouillée de rosée
Au vu de tous plus tard dans la journée sous le soleil bruissant
*
Cette différence dans le traitement de leurs ennemis par chacun des deux peuples
Avaient été relevée par Forbes qui avait émis l'hypothèse d'une différence de stade technologique
Les Yankrs à un stade plus avancé parce qu' ils auraient hérité d'une partie de la technologie
De la civilisation des machines arborescentes et pas les Karbs
*
les Yankrs aussi tuaient massacraient faisaient exploser des Yankrs en mille morceaux
Qui s’éparpillaient déchiquetés ensanglantés
Dans une pluie de lumière de chaleur de poussière de sang de chair
Dans le bourdonnement des mouches
*
Au prétexte qu'ils refusaient cette guerre contre les Karbs qu'ils jugeaient injuste
Les revendications des « difformes » leur paraissant justifiées
Du fait de cette « Transparence » cette sorte de « non-existence » à eux imposés
Termes que Forbes avait fini par comprendre
*
En se référant au regard que lui lançait Myrdane de plus en plus souvent
Qui lui glaçait le cœur
Qui le transperçait comme si elle ne le voyait plus
Comme s'il n'était plus que l'ombre de son ombre
*
Item les Karbs tuaient massacraient égorgeaient émasculaient vidaient de leur sang des Karbs
Leur coupaient la langue
Que des chiens errants en troupe hurlante aboyante dévoraient
Au prétexte qu'ils désiraient pactiser avec les Yankrs
*
Toute la Karbalnibardie ou Kambanibardie sombrait dans la barbarie la sauvagerie
Les plantes devenaient carnivores
Affirmaient les chroniques peut-être de manière exagérée
Qui les décrivaient comme très belles très éclatantes avec leurs pétales rouges jaunes verts
*
Elles mâchaient puis avalaient des morceaux des débris de viande
Des tronçons de Yankrs ou de Karbs noirs de mouches
Et à chaque génération seraient devenues plus grosses plus acharnées plus vrombissantes
Au point de pouvoir dévorer vifs de jeunes enfants
*
« Devenue ainsi un pays de cauchemar la Karbalnibardie »
Mais étrangement beau vaste avec ses vallées qui vociféraient
Ses montagnes qui grondaient ses plateaux qui sifflaient
Ses Karbs et ses Yankrs qui pleuraient affirmaient les chroniques
*
Seul le Spharague recouvert du sable gris venu de la mer des cendres
A l'époque bien plus étendue qu'aujourd'hui
Échappait au désastre parce que vide de Yankrs
Et occupé seulement de quelques familles de « difformes » éparpillés dans son immensité
*
Libres insaisissables préservés du travail de destruction de dévastation de clochardisation
De « transparence » entrepris par les Yankrs depuis plusieurs décennies contre eux
Dans les contrées fertiles avec leurs champs géométriques rangés au cordeau où ils vivaient
Après la destruction de l'ancienne civilisation des machines arborescentes
*
La Karbalnibardie sombrait dans le malheur se vidait de sa vie
Ses plateaux grondaient ses vallées vociféraient
Ses pierres ses figuiers ses oliviers ses caroubiers geignaient affirmaient les chroniques
« Comme si un ogre les dévorait »
*
« Comme si une plante les enveloppait dans le voile noir de son parfum pour les étouffer »
Ses hommes ses femmes ses enfants les karbs les Yankrs pleuraient
Se vidaient de leurs larmes sans pouvoir les retenir
C’était cela la vie alors
*
« C'était cela cette guerre
La vie qui se vide de la vie
Le ciel muet la nuit hantée par les morts »
Forbes à la lecture de ces chroniques lacunaires de ce fait encore plus suggestives frissonnait
*
Pour tuer tous les Karbs les découper les empaqueter
les faire disparaître dans les nuits étoilées de ce pays ni vu ni connu
D’autres Yankrs étaient venus d’au-delà de la mer des cendres
Pour leur prêter main forte avec des machines compliquées
*
Celles de l'ancien temps des machines arborescentes
Avec des roues chuintantes des chenilles glapissantes
Des pieds articulés des bras articulés des plaques de blindage
« Comme d'énormes insectes cisailleurs »
*
Qui émettaient le fracas des forges du géant Murlor dans son château de fer
Hérissées d’armes automatiques de canons téléguidés de mitrailleuses électroniques
Aussi avec des avions étincelants qui lâchaient
Des bombes « intelligentes » qui explosaient sur les villages Karbs
*
Les pulvérisaient ne laissant qu’un nuage de poussière de Karbs
Avec des hélicoptères gracieux idem hérissés de mitrailleuses à infra-rouge à ultra-violet
Qui découpaient en pointillé tous les villages Karbs les hommes les femmes les enfants
Qui ainsi se vidaient de leur vie par ces décousures
*
« C’était cela cette guerre une immense décousure
Le grondement ininterrompu d’un géant en furie
Dans la forge de son château de fer
Qu'était devenue la karbalnibardie »
*
Les Yankrs contrôlaient la surface de ce pays de la mort omni-présente
Le ciel muet de ce pays qui se vidait de sa vie
Mais pas la surface ni
Les nuits peuplées du hurlement des morts devenus sauvages qui leur demandaient des comptes
*
Quant aux Karbs ils possédaient d’autres armes moins perfectionnées mais non moins tueuses
Si pas autant en une seule fois que celles des Yankrs
Ils s’enterraient creusaient des galeries des villes sous la terre
Des villes sous les villes des Yankrs
*
Ils étaient devenus un peuple souterrain troglodyte fantôme
Habitant des grottes des galeries des mines désaffectées
Ils traversaient à pied par ces galeries tout le pays pour surgir là ici
Au bout au bord du monde
*
Et tuer les Yankrs tout surpris
Ils tendaient aux Yankrs des pièges piégeant tout le pays
Chaque recoin chaque pierre chaque buisson chaque touffe d’herbe
Les Yankrs ne pouvaient plus marcher sur ce pays
*
Se déplacer sous peine de n’être plus que tronçons miettes de chair
Quand ils passaient outre ils explosaient en feu d’artifice de membres de tronçons de quignons
C’était cela cette guerre
Des êtres transformés en un ensemencement de membres ensanglantés
*
Les Yankrs se réfugiaient dans les airs pour mener la guerre
Depuis d'immenses plates-formes qui flottaient au-dessus de ce sol piégé
Ces plates-formes manœuvraient se déplaçaient lentement
Elles recouvraient de leur ombre les régions les montagnes les plateaux les vallées
*
Laissaient couler des rivières de plomb en fusion qui brûlaient tout calcinaient tout
« C’était cela cette guerre des flots de plomb fondu où grésillaient des morceaux de corps
Comme dans la cuisine infernale du château d’Ergromtre le rouge
Préparant son repas d'ogre »
*
Les Yankrs avaient rassemblé toutes les femmes les enfants les vieillards difformes
Les hommes difformes ayant disparu sous terre
Et les avaient placés sur des radeaux suspendus dans l’espace amarrés au sol par des filins
Entourés de barbelés électrifiés munis de miradors pour les surveiller
*
Les empêcher de voir leur mari leur père leur enfant les empêcher de les ravitailler
Pour interdire aux hommes Karbs de venir se reposer se réchauffer se soigner
Les Yankrs avaient ainsi contraints les Karbs
Les familles Karbes à quitter leur village pour les parquer dans ces camps flottants
*
Semblables sans doute à ceux où avait été placés empaquetés numérotés autrefois
Dans l'ancienne civilisation des machines arborescentes tout un peuple mystérieux
Dont on disait qu'il avait survécu et qu'il survivait dans l'empire aujourd'hui
Qu'évoquent certaines autres chroniques qu'il est interdit de consulter qui parlent des « têtes de pierre »
*
Les normaux continuant leur œuvre de mépris envers les difformes
Qu'ils avaient expulsé en bordure de la contrée pour ne plus les voir
Pour aimer seuls cette contrée la Karbalnibardie eux seuls la bâtissant soi-disant
les Karbs se contentant soi-disant de les regarder de creuser
*
De déplacer les décombres les gravats de transporter les cailloux
Les routes les villes construites par les Yankrs seuls soi-disant
les Karbs se contentant silencieux en haillons muets de transporter transparents
De déplacer les pierres le sable le ciment sur leur dos
*
Les Yankrs cultivant seuls ce pays soi-disant plantant leurs plantes l’enrichissant
les Karbs se contentant de creuser le sol pour manger quelques racines quelques céréales
Ne sachant pas cultiver soi-disant repoussés sur les bords incultes de ce pays
Sur les marges délabrées des villes aux extrémités des champs au bout transparents
*
S’entassant là ici en haillons tout poussiéreux silencieux et donc finissant par se révolter
Selon les chroniques cette guerre emportait tout
Elle charriait des débris de vie des morceaux de souvenirs des visages blêmes des enfants perdus
Des photos de famille des lettres délavées une boue de secrets révélés
*
C’était cela cette guerre
Des mots des pleurs qui s’éteignent dans la brume et qui emportent votre vie
Mais à la fin la déraison du plus fort ne l’emportait pas
Les Karbs gagnaient cette guerre
*
Les chroniques ne révélaient pas comment
Peut-être parce que les karbs avaient le droit pour eux mais
Comment savoir dans une guerre qui à la justice le droit pour lui
Peut-être parce qu'ils étaient plus durs plus résolus plus cruels
*
Peut-être parce que la providence était pour eux
Peut-être parce que les Yankrs savaient qu'ils avaient eu tort de refuser aux Karbs
Sous prétexte qu'ils étaient différents les droits qu'ils s'étaient arrogés pour eux
Les Karbs finalement étant des hommes si pas comme eux d'aspect
*
Des hommes qui pleuraient qui suppliaient qu'on ne les tue pas
Qui suppliaient qu'on les achève à cause de la souffrance insoutenable qui les dévorait
Qui perdait le même sang rutilant que le leur quand à leur tour ils étaient blessés
Et qu' à leur tour ils suppliaient qu'on ne les tue pas
*
Ou qu'on les achève à cause de la souffrance insoutenable qui les dévorait
Ce même sang qui noircissait sous le soleil de la karbanibardie comme le leur
Cette même chair que les mouches en essaim s'empressaient de dévorer
Finalement cette même souffrance authentiquement humaine
*
Ce même vide dans leur cœur à la perte d'un être cher
Ces mêmes larmes irrépressibles qui roulaient sur leur visage
Ces mêmes fantômes qui la nuit venaient les harceler jusqu'à les faire hurler d'impuissance
Cette même pitié qui parfois les envahissait devant la douleur d'une mère avec son enfant mort dans les bras
*
Finalement les karbs gagnaient cette guerre
Inexplicablement selon les chroniques mais Forbes avait son idée
Des Karbs contre les Yankrs des Yankrs contre les Karbs
Des Karbs contre les Karbs des Yankrs contre les Yankrs
*
Fous de joie dans les cris les pleurs d’allégresse
Les youyous de leurs femmes voilées tatouées
Les difformes descendaient des extrémités des bouts des bords des marges
Remontaient de l’envers pour occuper le centre l’endroit de ce pays-ci la karbalnibardie
*
En chantant en criant en riant en haillons en pantalons retenus par des ficelles
Ils n’étaient plus muets plus silencieux plus courbés plus discrets plus transparents
Ils étaient tout d’un bloc entiers opaques dressés droits ici là
Au centre au milieu à l’endroit de leur pays la karbaknibardie les vrais Karbs de vie de chair de joie
*
Point tous massacrés les Yankrs n’ayant pas réussi voulu ne pouvant pas tous les massacrer
Les Yankrs aimant les hommes en fin de compte du moins une majorité d'entre eux
Et en fin de compte au bout sachant y compris
Disent les chroniques le sorcier victimeur Proronski sans doute le chef des Yankrs
*
Que les difformes étaient des hommes
Et les traitant comme tels ne les tuant pas tous
Ne pouvant les tuer tous les exterminer
Comme autrefois dit-on avant l'empire des Sombres
*
Du temps de la civilisation des machines arborescentes
Un peuple avait tenté de le faire pour un autre peuple
Sous la direction d'un autre sorcier victimeur
Dont le nom fort heureusement avait été oublié
*
Les Karbs donc tout joyeux heureux ivres de joie de cris de fatigue de lumière de poussière
De paix revenue descendus des bouts des extrémités
Remontés de l’envers pour occuper l’endroit de leur pays la Karbalnibardie et
les Yankrs alors les Yankrs désespérés pleurant
*
Quittant le centre le milieu l'endroit de ce pays-ci de leur pays aussi la karbalnibardie
En pleurs en larmes ivres de fatigue de lumière de cris silencieux muets courbés
En longues colonnes de plusieurs milliers de lieues
De femmes en pleurs d’enfants en pleurs d’hommes en pleurs
*
Emportant avec eux une armoire un coffre un morceau de leur champ de leur maison
La fenêtre par où pendant des années ils avaient vu leurs enfants revenir de l’école
La porte d’où avait surgi il y a longtemps leur mari qui rentrait d'une autre guerre
Un morceau de tuile rouge de mur blanc de toit d'ardoise bleu
*
Sous lequel ils avaient fêté leur vingt trente quarante cinquante années de mariage
Une pile de carreaux de la chambre où était né leur enfant le coffre de leur grand-tante
L’armoire du grand-père arrivé dans cette contrée pour faire repartir la civilisation
Qu’il avait construite lui-même avec des arbres qu’il avait lui-même abattus
*
les Karbs se contentant de le regarder et de les transporter jusqu’à l’atelier de menuiserie
Ce pays la Karbalnibardie qu’ils étaient obligés de quitter à cause de leur chagrin
A cause d’eux-mêmes de leur injustice pensait Forbes
Emportant un fourre-tout de rires de pleurs de sentiments
*
De souvenirs précieusement conservés jusque là emportant une marmite
Une cruche remplie de la terre qu’ils foulaient tous les jours
Des photos très photographiques des trois ou quatre générations de leur famille
Qui avait vécu ici là dans ce pays d’où ils partaient sans espoir de retour pensaient-ils
*
Des colonnes et des colonnes de Yankrs qui transportaient leur vie leur mémoire
Leurs morts leur maison leur terre une route un quartier des arbres des pierres des ombres
De la chaleur de la lumière des ruines des odeurs épicées tout pêle-mêle
Entassés dans des glisseurs surchargés véritables arches de Noé qui ployaient
*
Sous l’entassement de ces portes ces fenêtres ces cheminées ces malles ces valises
Toutes ces colonnes files de Yankrs passant au milieu des cimetières
Qui accomplissaient un long détour pour passer au milieu des tombes
Où leurs parents leurs fils leurs amis leurs morts étaient ensevelis
*
Pour leur dire un dernier au revoir un ultime adieu
Tous hommes femmes enfants vieillards s’arrêtant devant ces tombes un moment
Prenant un morceau de tombe le fourrant dans leurs bagages
Alourdissant à la limite du supportable leur cœur
*
Avant de se rendre dans les gares pour embarquer quitter définitivement ce pays
Tout un peuple partant pour l’exil
Pour où les chroniques ne le précisaient pas
S’efforçant d’emmener un peu de son pays de son identité de sa mémoire
*
Tout cela très triste
Qui n’était qu'injustice
Comme écrit dans certaines de ces anciennes chroniques
Pas toutes
*
Sans que leurs auteurs d'origine Yankrs ou Karbs
Plus vraisemblablement Yankrs
Précisent pourquoi puisqu' ils étaient incapables de dire les raisons de cette guerre
Si évidentes pour d'autres pour Forbes aussi
*
Pour Forbes désespéré aussi ne comprenant pas pourquoi il était devenu si transparent aux yeux de Myrdane
Ne comprenant pas l' exil auquel elle le condamnait comme une évidence
Qui se creusaient la tête avec les ongles de son désespoir jusqu' au sang puis
Qui se coupait la gorge dans un terrain vague derrière des palissades à l'abri de ce regard qui ne le voyait plus
***
Rapporter son verre au comptoir d'un bar, un geste condamnable ? Cette question, en apparence saugrenue, est au coeur d'un conflit qui oppose la gérante d'un bar de Locmiquélic et l'Urssaf. L'administration lui réclame 9.000 € pour travail dissimulé.
*
Axiome libertarien n°1
aucun individu ni groupe d’individus n’a le droit d’agresser quelqu'un en portant atteinte à sa personne ou à sa propriété.
Par conséquent l'impôt payé sous la contrainte est une agression, un vol, " il s'ensuit que l'Etat qui subsiste par l'impôt, est une vaste organisation criminelle, bien plus considérable et efficace que n'importe quelle mafia "privée" ne le fut jamais
Murray Rothbard
*